Une pincée de rocambolesque pour pimenter la fin du voyage!

Publié le par clematit

Vous attendrez un peu pour les péripéties, je vous raconte Tobolsk d’abord.

On pourrait dire « on a voulu s’arrêter à Tobolsk parce qu’étant 3 chimistes (même si l’un de nous s’en est écarté depuis), il était impensable de ne pas faire étape dans la ville de Mendeleïev! » . Et oui, ça vous rappelle tous quelque chose, n’est-ce pas? Ce monsieur est le créateur du tableau périodique des éléments. Ca y est, les mauvais souvenirs pour vous rappeler de la phase mnémotechnique permettant de réciter tous ces foutus éléments vous reviennent? Et bien tout est de la faute de Tobolsk qui lui a permis de voir le jour.
3 - Statue MendeleievNon, la raison pour laquelle on s’est arrêtés dans cette ville c’est parce que notre guide lui attribuait une étoile -privilège suprême- et agrémentait son jugement d’une magnifique photo de kremlin. Je ne sais pas à quoi on s’attendait mais sûrement pas à ça.

Tout d’abord, comme à Tomsk, on a trouvé refuge dans les chambres de repos de la gare car il n’y a que trois hôtels dans cette ville, incluant celui où descendent Poutine et Medvedev quand ils viennent. On est retombés en enfance dans cette pièce décorée comme une garderie.
3 - Gare Tobolsk (2) 3 - Gare Tobolsk (1)
Le kremlin, oui c’est sûr, il est beau. C’est le seul de Sibérie en pierre et l’un des rares en Russie. Il date de 1800. Pour une ville de cent mille habitants c’est une aubaine d’avoir un tel patrimoine dans sa ville. Mais quand on sait que désormais les ressources de la ville proviennent du raffinage du pétrole et de la pétrochimie, ça noircit tout de suite le tableau.
Mais restons positifs et concentrons-nous sur ce qu’il y a de beau à Tobolsk. Son kremlin, donc, est situé sur un plateau d’une centaine de mètres de haut. Il domine la ville et la rivière, le Tom.  Au cœur se trouve la cathédrale Sainte-Sophie, la plus flamboyante et à côté la cathédrale de l’Intercession. Il y a aussi un manoir et un musée mais tous deux étaient en rénovation et fermés au public.
3 - Tobolsk (32) 3 - Tobolsk (9)

Quand nous sommes entrés dans la cathédrale Sainte-Sophie, il s’est trouvé qu‘une messe était en cours de célébration. Je m’arrête quelques instants sur l’intérieur des églises et cathédrales orthodoxes: tout d’abord il n’y a rien pour s’asseoir. Tout le monde est debout tout du long. Les femmes doivent couvrir leurs cheveux; le fichu est donc de rigueur. Ensuite il n’y a pas d’instruments: les chants sont forcément a capella. C’est ce qui nous a charmé pendant cette messe: deux choeurs de jeunes hommes (élèves? prêtres? moines?) chantaient à plusieurs voix, se répondant d’un couplet à l’autre. C’était saisissant. L’acoustique de la nef était incroyable et ils chantaient superbement bien.

3 - Tobolsk (22)

En sortant de la cathédrale, on s’est assis quelques minutes sur les bancs, le temps de voir passer un couple de mariés qui faisaient des photos. On ne peut qu’être épatés par la hauteur des talons des filles. Et notez-bien qu’elles ne portent pas ça QUE pour les mariages mais tous les jours (on s’en est rendu compte depuis) !
3 - Tobolsk (23)Voilà pour le joli côté de Tobolsk, qui occupe une infime partie de la ville. C’est mieux que rien me direz-vous. Certes. Mais le contraste entre le kremlin et le reste de la ville est saisissant. Le premier d’entre vous qui veut faire un film sur les sombres années staliniennes, ou sur l’Allemagne de l’est, je l’envoie direct à Tobolsk ! Je vous ai déjà montré la gare (voir photo plus haut); j’ajoute l’un des plus beaux immeubles et les toilettes de la gare (non ce n‘est pas la reconstitution d’un musée)

3 - Toilettes gare (4)3 - Beauté Tobolsk

On se trouvait au pied de l'immeuble, en train de prendre la photo, quand un couple d’étudiants est venu nous parler. En anglais. On a été surpris car aucun Russe ne nous avait parlé dans un anglais correct depuis le début. Enthousiasmés de trouver des touristes à Tobolsk, ils nous ont demandé « alors comment trouvez-vous notre ville? On en est si fiers! »  Euh…….. C’est sûr que le kremlin est beau mais sinon, c'est la plus belle ville du monde. « mais c’est parce que c’est une ville moderne! Si vous saviez à quel point c’était pire avant! » Là, on vous croit aisément! Les pauvres, on venait de passer une journée sous la flotte, tout était gris, notre humeur un peu aussi, ils n’arrivaient pas au bon moment.

Nous sommes repartis deux jours plus tard pour Kazan, la capitale de la république du Tatarstan, 1.2 millions d‘habitants. Avant de me pencher sur cette ville incroyable, un petit mot sur le train.
Dans l’article précédent, Clément a mis des photos du compartiment couchettes appelé « plaskart », la 3ème classe. Il faut aussi parler du wagon restaurant. On a remarqué que ce wagon n’était pas très fréquenté. On y a souvent passé des heures à jouer au tarot pour échapper un peu au wagon plaskart bondé. Les serveuses avaient l’air de s’emm…… à cent sous de l’heure. A deux reprises on s’est fait la réflexion que certaines serveuses d’âge mûr étaient vraiment habillées vulgairement: jupe très fendues, chemisiers transparents.... Une autre fois, une serveuse étaient saoule au dernier degré et draguait les clients masculins. Pas toujours très gai ce wagon!

Venons-en à Kazan. C’est le lieu de notre première expérience en Couch Surfing. « le quoi? » Couch Surfing c’est-à-dire, en français, le squattage de canapé. C’est en fait un site internet qui met en relation des gens qui voyagent et des gens qui ont une chambre d’amis ou un canapé disponible. Après deux expériences d’hébergement dans des gares, sans rencontrer personne, on a voulu échanger avec une personne locale, parlant anglais. Nous avons donc passé deux nuits chez Andrei. Il a 20 ans, est étudiant et part à Munich continuer ses études dès septembre.


Avec lui on a visité Kazan. Je disais que c’était la capitale du Tatarstan. La Russie est en fait un état fédéral comptant 21 républiques, 46 oblasts (=régions), 9 kraïs (=territoires), et 4 okrougs (= districts autonomes). La Tatarstan est la république la plus autonome des 21, à l’image de la Catalogne en Espagne. Les Tatars forment un peuple nombreux (presque 6 millions en Russie mais seulement un tiers au Tatarstan) musulman d’origine turque. Ils parlent le tatar qui ressemble beaucoup au turc.
Le kremlin de la ville, assez vaste, compte le palais présidentiel, un musée d’art (le petit frère de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg), une cathédrale orthodoxe et la merveilleuse, splendide, superbe -les superlatifs manquent- mosquée Kul Sharif qui date de 2005. L’entrée du palais présidentiel est aussi un monument: c’est la tour Suyembike. Cette tour a été demandée par la princesse tatare du même nom qui, forcée de se marier au tsar Ivan le Terrible, se jeta d’en haut une fois la tour achevée.
4 - Kazan (45)

4 - Kazan (18) 4 - Kazan (36)

Le kremlin est bordé par la Volga. La ville est au confluent de la Volga et de la Kazanka. Elle nous a semblé être une ville très vivante, dynamique, étudiante, jolie, et en pleine rénovation. En plus des jeux universitaires mondiaux en 2013, la ville recevra aussi la coupe du monde de football en 2018.
4 - Kazan (35) 4 - Kazan (15)

Après un voyage en train de nuit (le dernier!), nous arrivons à Nijni-Novgorod, la cinquième ville du pays, 1.3 millions d’habitants. Nous avions réservé un « apart-hôtel » sur internet c’est-à-dire un appartement entièrement meublé qu‘on peut louer pour une nuit. Et c’est LA que les aventures commencent!

Le train étant arrivé très tôt, 6h30 du matin, on soupçonnait qu’on trouverait porte close. Mais on s’attendait à trouver une enseigne ou à défaut une plaque sur l’immeuble! Mais non, rien, comme si ça n’existait pas. On a commencé à penser à une arnaque. Mais on a décidé de trouver un café en attendant que les commerces du quartier ouvrent et nous renseignent. On a marché pas mal avant de s’asseoir sur la terrasse fermée d’un fast food. Malgré le nombre de personnes se dépêchant d’aller au travail, la rue principale de Nijni-Novgorod reste close jusqu’à au moins 9h. Le fast food se vantant à renfort d’affiches d’avoir internet, on attend qu’il ouvre pour vérifier l’adresse. Mais pas de chance la connexion ne marche pas. Clément et moi on décide alors de retourner à l’adresse qu’on a noté et de demander aux commerçants de la rue pendant que Titi garde les sacs.
On s’adresse à une agence de voyage qui se trouve dans le même bâtiment que le prétendu « appart-hôtel ». Les femmes y sont adorables et très aidantes: elles fouillent sur internet, nous disent qu’on s’est fait avoir car dans l’immeuble il n’y a rien de tel, que le numéro de téléphone est bidon et finissent par appeler tous les hôtels de la ville pour savoir s’ils ont une chambre pas chère de libre. Rien. Tout est hors de prix. Dépités, on retrouve Titi au fast food et on décide de partir par le premier train à notre prochaine étape, Souzdal. On prend nos tickets au guichet et on s’installe à la terrasse du Mac Do pour avaler quelque chose. Les recherches à droite à gauche, ça creuse.
Clément, le ventre plein de cochonneries, décide d’envoyer un email à notre banquière pour la prévenir d’une éventuelle fraude. On ne veut pas faire opposition car on se retrouverait dans une situation délicate pour la fin du voyage. En parcourant sa boîte email, il trouve un mot du propriétaire de l’appartement, datant de ce matin à 9h, nous donnant les codes pour entrer. Il dit avoir envoyé un email 3-4 jours plus tôt disant qu’il fallait qu’on l’appelle. On ne l’a jamais reçu. Après conciliabule, Titi campe sur ses positions, il va à Souzdal, tant pis pour cette nuit déjà payée, tandis que Clément et moi on va changer nos billets de train pour le lendemain. On repart donc, sacs sur le dos, à travers la ville, retour à la case départ.


Et c’est là que se joue le drame: je me prends les pieds dans le tapis -enfin dans la rue- tombant d’abord sur les genoux puis mon sac (15kg tout de même) me propulsant en avant, et alors que j’essaie de me retenir avec la main gauche pour ne pas m’écraser la figure par terre, ma main reste coincée sous moi, les doigts retournés à 100 et quelques degrés. AIE !!! Ne réussissant pas à la dégager et à me relever, je me suis retournée sur le dos comme une vieille tortue pour que Clément détache mon fardeau. Un gars qui faisait de la publicité pour une pharmacie est venu « à notre secours » voulant à tout prix se rendre utile. On a fait la causette le temps que ma tête se remette en place et que Clément me rapporte un verre de glaçons.
Après une dizaine de minutes, on repart cahin-caha, Clément portant mon gros sac (15 kg) plus son gros sac (au moins 20kg) et son petit sac (un bon 5kg). Le pauvre bourricot, c’était pas le moment que ça arrive! Mais comme c’est jamais le moment, pourquoi pas là.


On arrive à la fameuse adresse une nouvelle fois et essayons le premier code. O miracle, la porte s’ouvre!  On monte dans les étages et à l’appartement 15.… on se casse le nez: ce n’est pas un code pour ouvrir la porte mais une clé. On sonne et resonne mais évidemment y a personne. Là on en a ras le bol. Mais il faut bien tenter le tout pour le tout. Clément retourne voir nos copines de l’agence de voyage qui se marrent de nous savoir encore là et contentes pour nous que ce ne soit pas une arnaque. L’une d’elles passe l’immeuble au peigne fin avec Clément pour trouver la clé. Personne ne l’a ni ne sait à qui s’adresser. Ils appellent donc le nouveau numéro donné dans l’email le matin-même, un vrai numéro cette fois, et tombent sur Sergueï, le proprio. Il explique qu’il attendait ce coup de fil depuis le matin pour s’arranger pour la clé. Clément, fâché par cette organisation à la noix de coco, lui dit qu’il la veut maintenant au plus vite. Malheureusement, il nous faudra attendre une heure de plus. Il est à peu près 16h déjà. 10h de galère!! Ras la casquette!
Le vieux monsieur qui nous apporte la clé (le pauvre il est en nage) nous apporte aussi une bouteille de champagne (russe) pour se faire pardonner (même si lui n’y est pour rien, c’est le proprio qui est un branquignole). Et il nous fait découvrir l’appartement. Il est superbe. Un peu vieillot mais confortable, grand, super équipé (trop pour une nuit mais puisque c’était la solution la moins chère de toute la ville) et idéalement placé, à 5 minutes du kremlin. On se calme d’un coup et on remercie Victor qui nous annonce que le lendemain il nous conduira gratuitement à la gare. Tout est bien qui finit bien.
On fait un petit tour à la pharmacie pour que quelqu’un nous montre comment on fait un bandage, un tour au supermarché pour acheter de quoi pique-niquer et en route pour un dîner champêtre sur les rives de la Volga, à 100m de l’appartement avec en prime un magnifique coucher de soleil! On l'aura bien mérité!
5- Soirée 24 juin pique nique sur la Volga (1)Le lendemain on visite le kremlin, les chars et autres véhicules de la 2nde guerre mondiale qui ravissent Clément.
5- Au kremlin 25 juin (2) 5- Au kremlin 25 juin (14)
On fait le tour des remparts et on admire la ville au bord de la Volga. Malheureusement, on n’aura pas eu le temps de faire un tour en bateau jusqu’à Gorodets, un petit village typique en aval. Ca aura été express!

Et là vous pensez que c’est fini? Qu’on est gentiment allé à la gare avec Victor et qu’on a pris le train puis le car et qu’on a finalement retrouvé Titi? Et bien tout ça est arrivé mais on a corsé la chose. Pourquoi faire si simple?


On était en avance à la gare et en entrant on avait remarqué, entre les indications pour les guichets, les toilettes etc. une petite croix « punkt medikal ». C’est à peu près ce qu’on a lu. Je me suis dit: je vais quand même montrer ma main (qui ressemblait à celle de Mike Tyson après un combat où il a pris la pâtée) à du personnel médical. L’infirmière, très sympathique et baragouinant grand maximum 10 mots d’anglais, voit ma main, la badigeonne de Bétadine et prend son téléphone. Elle raccroche et me dit « 20 minutes ». Quoi 20 minutes?? Qui avez-vous appelé? « l’hopital! L’ambulance arrive. » QUOI ???? Mais j’ai mon train dans 30 minutes! Elle rappelle et raccroche en disant «  speed ». Ah ben oui mais ça va pas suffire! Et à l’hôpital pour quoi faire? Elle me mime un truc plat sur mon bras. Je lui demande « vous voulez me plâtrer? » Elle acquiesce ne comprenant pas mais se disant que je dois avoir raison. Je cours voir Clément pour lui expliquer tout ça. Il est évidemment furieux qu’on loupe le train qui a quand même coûté cher, qu’on a changé etc. Il me suit tout de même avec les bagages. L’ambulance arrive et on nous demande de courir en laissant les bagages à l’infirmerie. On embarque et Simone au volant met la sirène et le turbo. C’est un film je vous dis! On s’arrête ………200m plus loin. Au pied d’un bâtiment qui date d’avant guerre et qui est apparemment un hôpital. Je rencontre un docteur ne parlant pas plus anglais qui me tire les doigts un par un, me triture les articulations en attendant ma réaction « J’AI MAL!!! » . Il me fait passer 2 radios. Et 5 minutes plus tard le verdict heureux tombe: rien de cassé! Ouf! Du coup pas de plâtre, on se tire, sans payer (c’est gratuit nous ont-ils fait comprendre), on remonte dans l’ambulance et Simone reprend les commandes. On arrive à la gare, 15 minutes après l’avoir quittée, on a 8 minutes pour prendre le train. Et là on décompresse. L’infirmière, touchée par nos aventures, m’avait glissé un petit mot en anglais dans ma main en partant « welcome to my home please, adresse, téléphone, Ludmilla ». Vraiment adorable!

Un dernier mot sur le train: la classe! Après les trains-couchettes qui commencent à dater nous voilà dans le nouveau millénaire: le train de la Russie Européenne. C’est un TGV qui va de Nijni à Saint Pétersbourg, bien large, avec des sièges aussi bien qu’en première chez nous alors qu‘on est en seconde, des fenêtres immenses tout du long, des écrans pour diffuser sans doute des films, la radio dans les accoudoirs etc. Dans chaque wagon il y a une hôtesse ou un stewart aux petits soins même si tout est payant. Ils vendent même des souvenirs! C’est un peu tape à l’œil mais très confortable et moderne.

La suite à Souzdal!

Publié dans Russie

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